BENOIT Armand
OUVRIER AJUSTEUR à AVIGNON (84)
Date de naissance : 20 avril 1914
Lieu de naissance : AUBENAS (07)
Date de décès : 26 juin1945 au cours du rapatriement
Lieu de décès : inconnu
Circonstances : Mort en déportation
Méthode de recherche Rail & Mémoire pour cette notice :
Archives SNCF 118LM109 2
Relevé monument aux morts de la gare de AVIGNON
Site Internet http://rail-en-vaucluse.blog4ever.com/blog/lirarticle-141963-515885.html
Livre mémorial de la FMD PAGE 1209 TOME 2
Livre mémorial du KZ Neuengamme
Armand BENOIT, né le 20 avril 1914. Employé à la S.N.C.F.
Membre du groupe F.T.P. des rotondes dirigé par Philippe Fajardot.
Arrêté le 26 avril 1944 après l'attentat des rotondes. Mort en déportation.
L'attentat de février 44...
Dans la nuit du 19 au 20 février, les explosifs déposés sur les machines garées au dépôt des rotondes d'Avignon, explosent à intervalles différents entre 18 H 45 et 4 H du matin. (la première explosion a eu lieu trop tôt... Un détonateur de 10 minutes ayant été glissé par erreur dans le lot de détonateurs de 2 H) Trente deux machines ont été minées, mais "seulement" 17 locomotives de vitesse et 5 pour trains de marchandises sont mises hors service pour une plus ou moins longue période (toutes les machines ont été réparées en 4 à 6 semaines). L'explosif transmis via M Chabert, a été "judicieusement" positionné sur les parties névralgiques des machines. La plupart d'entre elles ont eu foyer et cylindres détériorés par les explosions. Le chef du service de contrôle allemand du dépôt, demande alors au chef de dépôt de désigner sur le champ une équipe d'ouvrier pour visiter les machines et ôter les bombes non explosées. Celui ci, confirme qu'il n'est pas habilité à donner de tels ordres à son personnel. Devant l'insistance du gradé allemand, il se déclare prêt à visiter lui même les machines et en retirer les engins... Ce qu'il fait, ensuite accompagné par plusieurs cheminots... Mais, la dernière mise à feu se produit à 4 heures du matin. L'explosion tue sur le coup deux des cheminots du service de nuit réquisitionnés, occupés sous la menace allemande, à retirer la bombe placée sur la 231 G 277. Les corps de Maurice Wolf et Albert Brés sont placés à l'infirmerie du dépôt, alors que deux cheminots allemands blessés par la déflagration, sont conduits à l'hôpital militaire. L'un des deux décédera des suites de ses blessures. Outre le matériel roulant, les installations fixes sont aussi visées. Le local du tour à roues est partiellement démoli, alors que le tour lui même est sérieusement endommagé…
Peut-on, à ce stade du récit, prendre quelques instants pour tenter d'imaginer le déroulement de cette opération de guérilla? Certes cette tentative risque de paraître délicate, plus de quarante années plus tard dans un contexte bien différent, mais activons pour quelques instants notre imagination... Au delà des faits relatés avec précision sur le P.V. de gendarmerie, reconstituons l'opération... Nous sommes en 1944, l'occupant est omniprésent. Des hommes pourtant ont choisi la clandestinité et la lutte armée contre l'envahisseur. Les réseaux de résistance vauclusiens sont maintenant bien organisés, une certaine structuration des opérations est réalisée depuis Londres. Il faut d'ores et déjà préparer les opérations de grande envergure prévues par les armées alliées en vue du débarquement, en empêchant l'occupant d'effectuer les mouvements de troupes à sa guise. L'aviation "écrase" les objectifs stratégiques, mais ces actions sont meurtrières pour les civils et souvent peu efficaces en terme de destructions. Il faut agir de manière plus précise sans mettre les populations en danger. Nous pouvons donc imaginer des hommes se réunissant, au mépris du danger, dans l'appartement avignonnais du président du tribunal de Carpentras. Ils ne sont certainement pas tous cheminots, (bien que le groupe F.T.P cheminot comprenne 50 personnes) mais une telle opération ne peut être conçue sans une complicité parmi le personnel du dépôt. Il faut se rencontrer à plusieurs reprises pour préparer l'action avec soin et choisir des "relais" locaux tout à fait sûrs. Il faut aussi acheminer une grande quantité d'explosifs sans éveiller les soupçons et choisir les points "clé" du dépôt. Les cheminots connaissent les accès, les locaux à "frapper" en priorité et les éléments "sensibles" des locomotives, sur lesquels l'impact des explosions sera le plus efficace. Quel pouvait être en ces moments intenses l'état d'esprit de ces jeunes gens aventureux mais volontaires et décidés? Certainement une bonne dose d'exaltation et d'esprit de sacrifice, mais aussi une part d'inconscience et le mépris total du danger. "Un peuple qui ne se défend pas est indigne de vivre" clament les tracts... l'opération est prévue de longue date, mais elle est ajournée à diverses reprises. Et puis l'ordre parvient enfin. Tout est prévu pour le 19... Là encore il est difficile d'imaginer comment des hommes ont pu, au vu et au sus des Allemands et des cheminots non impliqués dans l'action travaillant sur le site, introduire la grande quantité d'explosifs dans les emprises du dépôt. Les produits sont stockés momentanément dans un autorail désaffecté et remisé sur une voie de garage. Les bombes sont probablement ensuite distribuées dans un local servant de vestiaire, cependant que des camarades en surveillent l'accès. Les attaquants ont choisi les machines les plus modernes et les plus rapides pour les sabotages. Elles sont garées sous l'abri et tout autour des rotondes Est et Nord. Les résistants cheminots se répartissent les tâches Il faut "opérer" avec une grande précision et une grande célérité. Un seul homme découvert et tout peut être remis en cause... Les coeurs doivent battre à tout rompre dans les poitrines, la tension nerveuse à son comble, mais la "raison" doit être la plus forte. Pour la plupart de ces hommes ce n'est probablement plus la première action de ce type. Les explosifs ont été "préparés". Ils sont constitués de plusieurs éléments assemblés. Un détonateur, un explosif primaire, un dispositif de retardement à base d'acide, et cinq rouleaux d'explosif "d'origine anglaise"; du plastic. Le tout est enveloppé de papier paraffiné et cerclé de fil de fer. Les "engins" sont placés sur les cylindres et les foyers des PACIFIC et autres machines. Certaines locomotives sont "froides" mais la plupart sont encore sous pression. Elles fument tranquillement, "classées" tout autour du pont tournant, alors que des ombres furtives glissent tout autour d'elles... Rapidement ces "ombres" disparaissent, alors qu'une autre équipe mine le local abritant le tour à roues et la machine outil. Puis, vers 18 H 45, une explosion sourde secoue le dépôt. La première machine vient d'être sérieusement endommagée... La première bombe à sauté trop tôt! L'alerte est donnée. Les saboteurs sont obligés de fuir emportant les explosifs qui n'ont pu être utilisés. Un cheminot réussit courageusement à faire sortir une bombe des emprises du chemin de fer... sur son vélo. Les saboteurs quittent rapidement les lieux... Pour autant leur angoisse ne se termine pas. L'enquête diligentée par le GESTAPO peut à tout moment leur être fatale... Chacun connaît le sort réservé aux résistants arrêtés... La mort dans le meilleur des cas, d'horribles tortures dans le pire... Mais ils n'en ont cure. La guerre n'est pas à son terme, l'ennemi n'est pas encore vaincu... Plusieurs partisans payent en effet de leur vie cette action d'éclat. Certains cheminots suspectés sont arrêtés et incarcérés à la prison des Beaumettes à Marseille. Une délégation des camarades du dépôt est reçue à Vichy par le capitaine Müller, chef de la GESTAPO. Mais celui ci refuse de remettre en liberté les "otages". Ils ne sont libérés que trois semaines plus tard, après l'arrestation des véritables "responsables" du sabotage. Quinze cheminots sont arrêtés et écroués. L'un d'entre eux est arrêté sur son lieu de travail le 24 février et emprisonné aux Beaumettes. Un autre, surpris en flagrant délit de sabotage, est fusillé sur le champ. Quatre sont fusillés au nord de Montélimar et les derniers déportés à Neuengamme. Ils n'en reviendront jamais... Louis Malarte est obligé de fuir. En tout et pour tout les Allemands procèdent à 21 arrestations. Cinq hommes sont fusillés, 2 meurent au maquis, 14 ne reviennent jamais au pays. Un seul est libéré des camps, mais son corps est dans un tel état d'épuisement et de malnutrition (il ne pèse plus que 30 Kgs) qu'il ne revoit jamais le Vaucluse... Il quitte le monde des vivants durant son voyage de retour.
POUR LIRE LA SUITE DE CE DOSSIER consulter les pages du site internet Ami ; Le Chemin de Fer en Vaucluse, de Jean Louis Bezet http://rail-en-vaucluse.blog4ever.com/blog/lirarticle-141963-748081.html